Apprenez à connaitre des personnes courageuses et inspirantes de la communauté franco-yukonnaise. Tous contribuent à améliorer la qualité de vie des francophones au Yukon à leur façon.
L’histoire à succès d’un immigrant francophone au Yukon. Originaire de Carcassonne, dans le sud de la France, Benjamin Poudou s’est retrouvé dans le nord du Canada grâce à une succession d’heureux hasards. Aujourd’hui, il est directeur du Club de ski de fond de Whitehorse et espère rendre ce sport de plus en plus accessible pour tous.
Benjamin Poudou est passionné de sports de plein air, comme l’escalade et le vélo de montagne. Au Canada, il a découvert le canoë camping, son nouveau moyen de prédilection pour explorer le territoire.
Benjamin Poudou a toujours été un touche-à-tout : « J’aime vraiment tous les sports de plein air! », clame-t-il, en riant et en avouant en même temps être excellent dans aucun, seulement « ok » dans tous.
Pendant ses études en environnement, qu’il a faites dans les Pyrénées et dans le Jura, il raconte avoir suivi une formation « biqualifiante », c’est-à-dire la moitié du temps en centre sportif et l’autre moitié, en nature. Cela lui a permis ensuite de travailler en France comme guide de randonnée et de vélo de montagne l’été et comme pisteur secouriste nordique l’hiver.
Benjamin avoue être atterri au Yukon un peu par hasard : « Ça s’est fait un peu par étapes. Je suis arrivé en 2014 au Canada. J’avais des amis au Québec en Gaspésie, alors je suis allé les voir en été. J’y ai rencontré ma compagne, qui est québécoise, et j’étais guide de kayak en mer. »
Si le plan initial était de passer l’été au Québec et l’hiver dans un centre de ski dans l’Ouest canadien, ils se sont finalement retrouvés, lui et sa conjointe, à faire du bénévolat dans un chalet touristique aux Territoires du Nord-Ouest. Et c’est là qu’ils sont tombés sous le charme du Nord. En 2017, ils ont toutefois choisi de s’installer au Yukon, pour les montagnes : « Il n’y en avait pas assez, [des montagnes], aux Territoires du Nord-Ouest », avoue Benjamin.
Le plus grand défi de son installation dans le Nord canadien a été, selon lui, l’apprentissage de l’anglais : « Je parlais anglais comme une vache espagnole! », s’exclame-t-il. Il a eu la chance de travailler auprès d’autres immigrants en situation d’apprentissage de cette langue : « En arrivant au chalet aux TNO, tout le monde venait de partout et tout le monde me corrigeait dans mon anglais, c’était assez génial. De baigner dans le truc, c’était la meilleure chose. »
C’est ensuite « une suite de coups de chance » qui l’ont amené à travailler pour le Club de ski de fond. Un jour, un ami à Yellowknife, qui était aussi président du club de ski de fond là-bas, leur a mentionné que le centre de Whitehorse était à la recherche d’un assistant-cadre. Benjamin a postulé, a obtenu le poste et est peu de temps après devenu directeur de l’établissement.
Depuis, Benjamin souhaite faire connaitre les plaisirs du ski au plus grand nombre. Surtout cette année, avec une hausse considérable du nombre de personnes s’étant abonnées pour la saison au Club : « On veut rendre [ce sport] plus accessible et trouver des moyens d’ouvrir le Club de ski à encore plus de monde. […] Nous explorons donc en ce moment la possibilité d'être plus inclusifs. » Il aimerait, par exemple, équiper le Club de fauteuils de ski pour les personnes en situation de handicap.
Benjamin est aussi impliqué auprès de la Patrouille canadienne de ski, un organisme accrédité en matière de formations de secourisme, présent lors des compétitions sportives.
Bref, Benjamin Poudou est un bel exemple qu’il est possible de prospérer en tant qu’immigrant francophone en situation minoritaire. D’ailleurs, il se plaît bien au Yukon : « Je trouve que la communauté francophone est super dynamique, je parle très souvent en français au ski club, c’est assez incroyable! […] La communauté ici est fabuleuse quand on aime le plein air, quand on aime tout faire. »
Le bien-être de la communauté, avant tout. Entre son poste de directrice de la Garderie du petit cheval blanc et les nombreuses heures de bénévolat qu’elle consacre à différents organismes, Jocelyne Isabelle ne chôme pas. Toujours soucieuse du bien-être des gens autour d’elle, la Franco-Yukonnaise d’origine montréalaise ne cesse d’enchainer les projets pour soutenir la cause des femmes, des familles et de la petite enfance de la région.
L’éducation à la petite enfance a toujours été une passion pour Jocelyne Isabelle.
« J’ai toujours été une personne qui voulait rendre service aux gens », raconte Jocelyne Isabelle. « Tous mes projets et mes engagements, c’était pour faire que les gens autour de moi vivent une vie meilleure. »
Jocelyne travaille dans le milieu de la petite enfance depuis ses 18 ans, ce qui lui fait un peu plus de 20 années d’expérience dans le domaine. Après des études en éducation spécialisée et en éducation à l’enfance, elle a successivement occupé des postes d’éducatrice et de directrice en garderies au Québec… Jusqu’à ce qu’on lui parle, en 2016, d’un contrat de remplacement à la direction de la Garderie du petit cheval blanc. Contrat qu’elle a accepté et qu’elle n’a pas regretté.
Lorsque son contrat s’est terminé, 18 mois plus tard, elle raconte être brièvement retournée au Québec, avant de revenir s’installer définitivement à Whitehorse en 2018, où elle s’est impliquée comme directrice pour l’organisme pour les femmes francophones du Yukon, Les EssentiElles.
L’éducation à la petite enfance a toujours été une passion pour Jocelyne. C’est pourquoi elle a finalement repris le poste de directrice de la Garderie en 2019.
Récemment, avec l’aide de la Fondation Marie-Vincent au Québec et des EssentiElles, elle s’est investie pour mettre en place au Yukon le programme Lanterne, dédié à la prévention de la violence sexuelle par l’éducation à la sexualité et la promotion des relations égalitaires auprès des tout-petits et de leur entourage. La formation pour devenir formatrice a donc pu être offerte pour la première fois hors Québec grâce à leurs efforts concertés.
Elle travaille actuellement avec plusieurs spécialistes et le Collège Éducacentre, un centre de formation continue à Vancouver, à la mise sur pied de nouveaux cours pour les programmes techniques d’éducation à l’enfance en français, spécifiquement adaptés à la réalité des francophones du Yukon et de la Colombie-Britannique. Ils espèrent ainsi permettre aux éducatrices et aux éducateurs francophones d’ici, de poursuivre leur formation dans leur propre langue.
Selon elle, la communauté francophone bénéficierait énormément d’un « centre de gestion des traumatismes en français, pour les femmes », car s’il y a beaucoup de services déjà existants, ils ne sont malheureusement pas offerts en français. « Une femme qui [vit de la violence], c’est déjà difficile d’en parler, alors d’en parler dans une autre langue, [c’est encore plus difficile] », résume-t-elle.
Parallèlement, Jocelyne avoue consacrer une bonne partie de son temps libre à des activités bénévoles. Elle est, entre autre, commissaire à la Commission scolaire francophone du Yukon, au sein de laquelle elle partage ses compétences en petite enfance et son expérience de terrain avec l’équipe.
Enfin, en plus de grandement se soucier du bien-être des familles et des enfants, Jocelyne est très préoccupée par la situation des femmes, et surtout celle des femmes francophones en milieu minoritaire. C’est pourquoi elle était encore jusqu’à tout récemment sur le conseil d’administration des EssentiElles et représentante du Yukon pour l’Alliance des femmes de la francophonie canadienne.
Une accompagnatrice généreuse pour les nouveaux arrivants francophones. Adjointe administrative à la Garderie du petit cheval blanc, Leslie Larbalestrier inspire la communauté par son dévouement auprès des nouveaux arrivants francophones qui viennent travailler à la garderie.
Leslie Larbalestrier se considère un peu « comme une petite maman » pour les nouveaux arrivants francophones.
Elle est née en Belgique et a immigré au Canada alors qu’elle était dans la vingtaine. À contre-courant de la société, elle a longtemps mené un mode de vie nomade avec sa famille, vivant dans un autobus modifié six mois par année et, le reste du temps, à l’étranger, en voyage-travail-école, aux États-Unis ou en Europe.
Ayant habité quelque temps au Québec, elle a finalement choisi de s’installer au Yukon, un lieu qui lui ressemble davantage, selon elle. Depuis 2014, elle occupe le poste d’adjointe administrative à la Garderie de petit cheval blanc, à Whitehorse, là où elle s’est fait connaitre pour son dévouement, qui dépasse largement les exigences de son poste.
Chaque année, Leslie participe au Forum mobilité de Destination Canada, lors duquel elle recrute des candidates et des candidats francophones pour travailler à la Garderie, pour une expérience d’une à cinq années.
À partir du moment où les personnes intéressées sont acceptées, c’est elle qui les prend en charge et les aide à se préparer à la vie au Canada : « C’est moi qui fais leur visa et qui leur fournis les informations importantes pour leur arrivée, précise-t-elle. Je vais les mettre en contact avec des gens de la communauté. [Pour les étudiants], je les amène même camper! ».
Celle qui se considère un peu « comme une petite maman » pour les nouveaux arrivants francophones n’hésite pas à les prendre sous son aile, le temps qu’ils s’adaptent à leur nouvel environnement. Il s’agit parfois d’étudiantes et d’étudiants, mais aussi parfois de familles avec des enfants : « Je m’assure alors que les enfants se sentent accueillis et je mets en garde tout le monde qui pensent que les ours n’existent pas », ajoute-t-elle en riant.
Elle-même immigrante, elle a parfois trouvé cela difficile de se refaire un réseau social. Mais ici, « on [l’a] beaucoup aidée, surtout à l’Association franco-yukonnaise (AFY) ». Maintenant, elle repaie au suivant.
Leslie Larbalestrier se sent dorénavant plus franco-yukonnaise que belge : « Je viens d’Europe, où c’est très individualiste. » Elle aime beaucoup l’effet de petite communauté et le mode de vie qui vient avec.
Lorsqu’on lui demande ce qu’elle aimerait voir se réaliser pour la communauté, elle répond qu’elle souhaite qu’il y ait un meilleur accès aux services en français. « Ce qui était difficile, à mon arrivée ici, c’était de ne pas avoir tous les services en français, comme un médecin de famille, confie-t-elle. C’était assez compliqué pour les soins de santé. » Mais elle assure que la situation a bien changé depuis, surtout grâce au Partenariat communauté en santé (PCS) et elle espère que les changements continuent d’évoluer dans ce sens.
Une carrière pour l’éducation en français. Entre 2009 et 2013, à l’époque où elle était encore directrice générale à la Commission scolaire francophone du Yukon (CSFY), Lorraine Taillefer a mené de front, avec toute son équipe, le recours judiciaire opposant la CSFY au gouvernement du Yukon pour l’obtention de la pleine gestion scolaire de l’éducation francophone sur le territoire. Aujourd’hui retraitée, elle demeure impliquée pour la défense de la francophonie et une figure de détermination et de persévérance.
Aujourd’hui retraitée, Lorraine Taillefer demeure impliquée dans la défense de la francophonie en tant que vice-présidente de l’Association franco-yukonnaise.
Lorraine a toujours été passionnée par l’éducation, mais ce sont les naissances de ses deux filles qui l’ont poussée à s’impliquer pour la défense d’une éducation en français en contexte minoritaire, pour qu’elles puissent avoir accès à l’école dans leur langue maternelle. Le combat qu’elle entamait alors pour ses propres filles est devenu une lutte menée pour tous les enfants et toutes les familles francophones.
Tout a commencé alors qu’elle résidait aux Territoires du Nord-Ouest, dans la communauté de Hay River, où elle occupait les postes de présidente de l’Association franco-culturelle de Hay River et de vice-présidente à la Fédération franco-ténoise.
Là-bas, elle a fait partie des pionniers qui ont mis sur pied la Commission scolaire francophone des Territoires du Nord-Ouest, ce qui a mené les communautés francophones de Yellowknife et de Hay River à l’obtention de la pleine gestion de leurs écoles. Son acharnement à faire reconnaitre le droit à des infrastructures équivalentes pour l’éducation en français s’est poursuivi à son arrivée à la CSFY, en 2006.
Avec l’appui de son équipe, du personnel de l’École Émilie-Tremblay, de l’Association franco-yukonnaise et de nombreux bénévoles dont elle louange le courage, la vision et la détermination, Lorraine a navigué pendant cinq ans à travers la saga judiciaire pour laquelle la communauté francophone a finalement signé une entente avec le gouvernement du Yukon, en 2020. « J’en ai des cheveux gris », dit-elle aujourd’hui en riant, se remémorant l’expérience.
Après sept années de travail acharné auprès de la CSFY, elle devient ensuite successivement surintendante et sous-ministre adjointe au ministère de l'Éducation du Yukon.
Sa vision de l’éducation est holistique. Selon elle, l’enseignement n’est pas qu’un conduit à sens unique, de l’enseignant à l’élève : « Le système au complet est un partage de connaissance; [avant de transmettre des savoirs], il faut s’assurer de bien comprendre les gens. De montrer qu’on est intéressé par ce qu’ils sont. C’est une relation interpersonnelle, ça va dans les deux sens. »
Son souhait pour la communauté francophone est qu’elle continue « de trouver sa fierté et de croître, de continuer à garder une ouverture et d’enseigner aux gens qui ne comprennent pas [l’importance de la langue française]. »
Lorraine a longtemps été entraîneuse de ski de fond, de volleyball et de course à pied. Bien qu’elle ait cessé d’entraîner depuis un bon moment, elle est toujours aussi passionnée et dévouée. Elle est aujourd’hui instructrice de Pilates et siège bénévolement en tant que vice-présidente à l’Association franco-yukonnaise. Elle est aussi régulièrement invitée à des comités en tant que consultante, tant au Yukon qu’ailleurs.
Contribuer à l’enseignement en français au Yukon. La Franco-Yukonnie est bien redevable à Marc Champagne pour tout le travail accompli en tant que directeur général de la Commission scolaire francophone du Yukon (CSFY) dans le projet de construction du Centre scolaire secondaire communautaire Paul-Émile-Mercier (CSSC Mercier). S’il était en poste lorsque l’entente de règlement a été signée, il a été tout aussi présent pendant ces nombreuses années éprouvantes de recours judiciaires qui ont enfin mené à l’inauguration du CSSC Mercier.
Selon Marc Champagne, même si l’entente avec le gouvernement est signée et que le CSSC Mercier est maintenant ouvert et fonctionnel, il lui reste encore beaucoup de travail sur la planche.
Originaire de Bonnyville, un tout petit village en Alberta, Marc Champagne connaît bien la réalité de l’éducation francophone en milieu minoritaire. C’est après des études en science politique et en management à l’Université Carleton à Ottawa puis une thèse en affaires internationales qu’il décide finalement de compléter un programme pour devenir enseignant.
Employé pendant un certain temps en Ontario et au Labrador, il se découvre une réelle passion pour l’enseignement au primaire. Il manquait cependant un petit quelque chose, là-bas : « Il n’y avait pas d’école francophone [au Labrador], explique-t-il. On voulait habiter dans le Nord, où il y avait une école francophone. » C’est ainsi que lui et sa conjointe débarquent au Yukon, en 1998.
Marc raconte avoir essentiellement fait toute sa carrière à l’École Émilie-Tremblay, au primaire, où il a été temporairement directeur pendant deux ans, avant de retourner en salle de classe. Puis, en 2015, il est devenu directeur général de la CSFY : « Une de mes grandes motivations pour ce poste était le défi de construire l’école secondaire. À ce moment-là, c’était encore un rêve, mais pas longtemps après mon entrée en poste, on a démarré un comité pour commencer le travail sur le projet. »
L’expérience a été extrêmement difficile. « Mais, ajoute-t-il, quand on voit où on en est en tant que commission scolaire, on peut se dire que ça en a valu la peine, même si les négociations ont pris près de cinq ans, qu’elles m’ont fait perdre beaucoup de sommeil et que c’était de longues journées de travail. »
Même si l’entente avec le gouvernement est signée et que le CSSC Mercier est maintenant ouvert et fonctionnel, il reste encore beaucoup de travail sur la planche, selon lui : « On n’a pas encore terminé le projet. Oui, l’école est ouverte, mais je travaille beaucoup pour boucler certains projets, comme l’affichage numérique, la gestion de la scène et le fonctionnement des espaces communautaires. On n’a pas de modèle à suivre au Yukon, alors on est un peu en train d’inventer une façon de faire vivre les espaces communautaires. On veut évidemment développer le partenariat avec la communauté. […] Ça commence à prendre vie. »
Actuellement, Marc Champagne travaille aussi avec son équipe à offrir un meilleur accès aux services pour les élèves francophones à l’extérieur de Whitehorse. Parce que, comme le souligne le directeur général lui-même, il s’agit bien de « la Commission scolaire francophone du Yukon, pas seulement celle de Whitehorse! »
Enfin, pour l’ultra marathonien et adepte de sports de plein air qu’il est, le Yukon est un merveilleux terrain de jeux, où il se sent chez lui : « J’espère ne jamais quitter le Yukon. Tout le monde ici aime le plein air et la nature. Je me trouve entouré de gens qui aiment les mêmes choses que moi! »
L’aventure, même au temps de la pandémie. Alors que la pandémie frappe de plein fouet les industries du tourisme et du voyage, l’entrepreneur et guide de plein air Maxime Goyou-Beauchamps a fait le choix de se reconvertir en navigateur financier le temps de la crise sanitaire pour aider les autres opérateurs touristiques au Yukon à traverser ces temps difficiles.
Maxime Goyou-Beauchamps et sa conjointe Miléna, le 6 juillet 2019, lors d’un trek dans le secteur du lac de Bock.
Maxime Gouyou-Beauchamps a grandi dans les Alpes du Nord. Si les grands espaces et les montagnes ne manquent pas là-bas, il a tout de même toujours été fasciné par le Canada et sa nature sauvage. Arrivé à Whitehorse en 2011, il ne s’est toujours pas lassé de cette terre d’aventures. Il y a même cofondé sa propre agence de tourisme écoresponsable, Terre boréale.
Il s’agit de l’une des rares agences de tourisme francophone. Avec sa conjointe, il y propose des excursions en nature dans des régions peu accessibles, comme des randonnées de plusieurs jours et des aventures en canoë. Leur marque de commerce : des petits groupes de six personnes au maximum, afin de conserver la magie d’être complètement seuls au cœur des milieux sauvages.
La réalité a cependant subitement changé en 2020 pour l’industrie touristique. La fermeture des frontières du Yukon aux déplacements non essentiels a décimé ce secteur économique et les entrepreneurs du milieu peinent à survivre depuis.
« La COVID-19 a cassé le tourisme, alors il a fallu trouver autre chose », raconte le diplômé en conservation de la biologie. Maxime a donc fait un choix inusité : il est temporairement devenu navigateur financier pour l’Association de l’industrie du tourisme du Yukon (TIA YUKON), un poste mis en place pour supporter les entreprises qui ont subi une perte de revenu dans la dernière année.
Son rôle est maintenant de conseiller les opérateurs touristiques du territoire pour les aider à trouver du financement, afin de survivre au ralentissement de leurs activités : « J’essaie de créer des liens entre les gens qui ont besoin d’aide et ceux qui ont les moyens d’aider. »
Il faut dire aussi que Maxime Gouyou-Beauchamps est bien placé pour comprendre les enjeux du secteur. Il siège notamment au conseil d’administration de la Wilderness Tourism Association of Yukon (WTAY) et à celui du Yukon Tourism Advisory Board (YTAB). Pour lui, « c’est un plus d’être du milieu, parce que ça aide à comprendre les problèmes [que vivent présentement les entrepreneurs]. »
Si la pandémie a freiné toute une industrie, le Français d’origine n’a pas cessé de rêver pour autant. Influencé par les écrits de John Muir et de Jack London, Maxime Gouyou-Beauchamps poursuit son exploration du territoire… et va plus loin encore. Son prochain grand projet : traverser l’océan Pacifique en voilier.
Partager la passion des livres. Les Franco-Yukonnaises et les Franco-Yukonnais connaissent Naomi pour ses excellentes suggestions littéraires en tant qu’assistante-bibliothécaire à la Bibliothèque publique de Whitehorse. Mais Naomi n’est pas qu’une dévouée passionnée de littérature, elle est aussi une artiste au cheminement singulier.
Partager ses propres découvertes est ce que Naomi aime le plus dans son travail d’assistante-bibliothécaire.
Elle n’avait aucune idée qu’elle deviendrait un jour bibliothécaire au Yukon. Il faut dire que Naomi a connu un parcours des plus diversifié, qui teinte indéniablement son expérience.
Pendant plusieurs années, par exemple, avant de s’établir à Whitehorse, elle a été assistante de recherche à l’Université McGill à Montréal, auprès d’un professeur de philosophie hindou. Elle faisait, entre autres choses, de la translittération, c’est-à-dire de la traduction d’un alphabet à un autre, de textes sanskrits.
Elle a également passé quelques saisons à Paris, où elle a brièvement travaillé au Musée d’Art Moderne, mais où elle a surtout vécu la vie d’artiste, passant la plupart de son temps à courir les vernissages.
Parallèlement, elle a toujours été passionnée par la calligraphie, qu’elle s’est appropriée comme forme d’art. Pour sa dernière exposition, sur le thème de la perte de mémoire en tant que perte d’une histoire, elle s’est inspirée d’extraits des œuvres de Guy de Maupassant et de photos du cimetière du Père-Lachaise.
À une époque où tout va si vite et que les livres n’ont plus autant la cote aux côtés des innovations technologiques, la littérature, ça sert à quoi? Pour Naomi, « ça sert à tout, en fait », parce qu’ « on lit partout et tout le temps. Notre cerveau est formé par le langage, qui lui-même crée notre réalité. On peut manipuler la réalité avec la façon dont on utilise le langage et les histoires qu’on choisit de raconter. »
Naomi affirme que la littérature a beaucoup changé et qu’elle continue d’évoluer à toute vitesse : « Pour être quelqu’un qui aime lire, il ne faut pas lire que du Shakespeare. » Au contraire, elle plaide pour une littérature en dehors des canons littéraires. Ses autrices préférées et ses auteurs préférés sont Octavia E. Butler, China Miévelle et P. Djèlí Clark, parmi tant d’autres.
Partager ses propres découvertes est aussi ce qu’elle aime le plus dans son travail. Pour elle, l’aide à la recherche est un merveilleux défi, « surtout pour les jeunes [en quête de nouvelles histoires] et pour les gens qui lisent tellement, qu’ils ne savent plus quoi lire. Je leur trouve quelque chose [à se mettre sous la dent]. Je discute souvent avec les gens, pour voir ce qui les intéresse. Ça me permet aussi de fouiller et de découvrir les nouveautés. » Naomi espère obtenir bientôt un poste permanent qui lui permettrait de s’investir davantage et de développer encore plus de liens avec la communauté.
Son amour de la bibliothèque vient aussi du fait que c’est l’un des derniers endroits « gratuits » qui existe; un endroit ouvert à tout le monde, sans restrictions. Sans surprise, elle se dit grandement inspirée par les mouvements communautaires et par les groupes qui se supportent et s’entraident, comme Black Lives Matter et les Premières Nations. C’est pourquoi ses suggestions littéraires sortent généralement des sentiers battus, afin de donner plus de place aux voix que l’on entend moins souvent.
Artiste, citoyenne solidaire et assistante-bibliothécaire dévouée, Naomi Collins a de quoi inspirer les Franco-Yukonnaises et les Franco-Yukonnais et leur donner envie de lire.
Le visage de la lutte antiraciste au Yukon. Elle est féministe, organisatrice communautaire, conférencière et activiste pour la libération des personnes noires et queers. Paige Galette se définit sous de nombreux angles. Une chose est sûre pour la Franco-Ontarienne établie au Yukon depuis 2017 : même si les luttes progressent, il reste encore beaucoup à faire.
Paige Galette se décrit elle-même comme une femme d’action : « Je bouge très vite, je suis passionnée par le mouvement. »
Paige est appelée comme spécialiste des luttes antiracistes à travers le Canada. Il ne se passe pas un mois sans qu’elle ne participe à un panel ou qu’elle ne facilite des ateliers sur le sujet.
La jeune femme a toujours un agenda bien rempli. Elle se décrit elle-même comme une femme d’action : « Je bouge très vite, je suis passionnée par le mouvement. »
En 2020, Paige a signé le chapitre intitulé « From Cheechako to Sourdough: Reflections on Northern Living and Surviving while being Black » dans l’ouvrage à succès Until We are Free: Reflections on Black Lives Matter in Canada. Elle se dit extrêmement fière de cet accomplissement : « Je n’aurais jamais cru que j’aurais écrit pour un livre […]. Je suis aussi très fière d’eux [les coauteurs] d’avoir créé cette plateforme. Ma fierté va envers eux aussi. »
Elle est également chroniqueuse pour FrancoPresse, ce dont elle se réjouit, puisque cela lui permet d’évoquer régulièrement les enjeux qui la touchent dans un périodique francophone.
En plus de ses activités en tant qu’autrice, Paige fait partie des cofondatrices et cofondateurs du collectif inclusif Northen Voices Rising. Ce collectif lutte contre le racisme, la discrimination et les structures de pouvoir oppressives dans tous les aspects de la société, pour un changement immédiat et durable.
Paige Galette est aussi très occupée par les nombreux ateliers sur la prévention de la discrimination en milieu de travail, qu’elle offre en collaboration avec le gouvernement du Yukon aux employées et aux employés de la fonction publique.
Parmi les personnes qui l’inspirent, elle est catégorique : ses plus grandes idoles sont Prince et Beyonce. « C’est très Hollywoodien, dit-elle en riant, mais les deux sont des personnes qui poussent, qui ont osé. Quand on leur a dit "non", ils ont fait tout le contraire. »
Si les défis sont nombreux dans le cadre de ses activités sociopolitiques, le plus difficile, selon elle, reste de devoir subir quotidiennement les mêmes micro agressions et injustices contre lesquelles elle lutte : « J’adore faire ce que je fais, mais c’est tough. C’est dur d’être appelée comme experte dans ces luttes […] et de vivre la même chose au quotidien. Les gens ne le remarquent pas, mais ça pèse sur la santé mentale, de lutter et de le vivre en même temps. »
Son souhait pour la communauté yukonnaise est que celle-ci apprenne à poser un regard critique sur elle-même, qu’elle s’implique davantage et qu’elle s’éduque. Même si la situation ici semble meilleure que dans les provinces du Sud pour la reconnaissance des Premières Nations, et que ça « aide à ouvrir le chemin pour les personnes racialisées, il reste quand même encore un très long cheminement à faire », selon l’activiste.
L’aventure en immersion française. Offrir des activités de plein air avec une touche francophone : voici la marque de commerce de Yu’Ski Expeditions, une entreprise d’expéditions de ski de randonnée nordique, fondée par Raphaëlle Couratin et Fabien Cayer-Barrioz en janvier 2020. Quelques mois plus tard, ils prolongeaient l’idée et créaient Yu’Speak French Immersion Outdoors, un programme de camp de jour destiné aux enfants anglophones qui désirent apprendre le français tout en s’amusant en pleine nature.
Fabien et Raphaëlle souhaitent que la communauté franco-yukonnaise puisse découvrir davantage la multitude d’activités de plein air qu’il est possible de pratiquer au Yukon.
Raphaëlle et Fabien sont ensemble depuis onze ans. Ils se sont rencontrés en France, dans les Alpes. Il était patrouilleur sur les pistes de ski, secouriste et guide à cheval; elle était monitrice de ski de fond et guide de randonnée en montagne.
À leur arrivée au Yukon en 2016, ils ont poursuivi leur passion des montagnes au centre de ski du Mont Sima, en tant que monitrice et patrouilleur de ski.
Depuis, ils n’ont plus eu envie de repartir : « On aime bien l’esprit des gens ici, des gens simples qui sont très accueillants, même si on est étrangers, avoue Fabien. Et la plupart des gens viennent aussi d’ailleurs, ce qui fait que [la culture ici] est vachement riche. Chaque fois qu’on rencontre une personne, c’est un peu comme si on rencontrait un pays. »
Après quelques années à explorer le territoire, l’idée de développer eux-mêmes des expéditions de ski de randonnée nordique est donc venue naturellement. Si leur clientèle était essentiellement européenne au départ, la pandémie et les restrictions relatives aux voyageurs internationaux et nationaux ont vite fait changer les choses. Ils ont alors adapté leur offre à la clientèle locale, en remplaçant les excursions de plusieurs jours par des leçons à la journée et à la demi-journée. Ils offrent aussi des activités de camping d’hiver et du ski-joëring.
Depuis l’année dernière, Raphaëlle est aussi assistante d’enseignement et monitrice de français à l’École Montessori. Afin de garder contact avec ses élèves durant l’été et pour leur permettre de poursuivre leur apprentissage de la langue, elle et Fabien ont décidé de créer un camp d’été d’immersion française pour les jeunes : Yu’Speak French Immersion Outdoors.
Ils proposent ainsi toutes sortes d’activités extérieures, comme de la randonnée, du vélo de montagne, de la randonnée équestre et de la pêche à la mouche, toujours en petits groupes de quatre enfants maximum. « On a toujours travaillé avec les enfants, raconte Raphaëlle. Moi, c’était en tant que monitrice de ski et Fabien faisait de l’animation quand il était plus jeune. On voulait faire ça petit et familial. […] On s’est rendu compte qu’on aimait beaucoup ça. »
Enfin, s’il y a une chose que Fabien et Raphaëlle souhaitent pour la communauté franco-yukonnaise, c’est de découvrir davantage la multitude d’activités de plein air qu’il est possible de pratiquer au Yukon : « On a tendance à oublier [les gens qui vivent ici], mais, ce que l’on souhaite, c’est faire découvrir aux locaux leur territoire et qu’ils soient bien équipés et en sécurité [pour le faire]. C’est ce qui fait le charme du Yukon pour nous : c’est sauvage et on veut que ça reste comme ça. On aime bien participer à ça. »